Et si
Et si nous faisions de cette 7ème édition de [frasq] une fête, en donnant à chacun des artistes invités le temps de déployer son monde, en lui ouvrant l’espace du Générateur le temps d’une soirée. L’occasion de mettre au jour la temporalité propre à la performance : art du présent, tout autant qu’art de la discrétion.
Au moment où la visibilité est devenue une injonction « manière de traquer l’individu dans sa vie intime comme dans sa vie sociale », apprendre à se faire discret est une façon d’affirmer une forme de clandestinité.
Un artiste, pour pouvoir agir, préfère parfois l’ombre à la lumière. À l’heure où l’État se désengage et fragilise nombre de structures périphériques, Le Générateur fait donc, à travers cette nouvelle édition de [frasq], le choix de se radicaliser encore plus. Il renouvelle sa confiance à des artistes dont les pratiques hybrides et les univers ouvrent un champ des possibles.
Pour la 10ème Nuit Blanche du Générateur, Alberto Sorbelli éprouvera le temps de l’attente avec une nouvelle et troisième mise en scène du Bal rêvé. Place à l’univers fantastique et pictural de Laurent Melon avec la projection de ses Scoopitones et la diffusion de son émission radio Léo 38 en direct du Générateur. Nouvel Iconicum de David Noir qui, grâce à un savant jeu d’images projetées, trouble la place du performer et du spectateur. Sarah Cassenti renouvellera dans la durée l’expérience de son Nonüde, un atelier de dessin et une expérimentation live ouverte au public. La question du format sera encore posée par Éléonore Didier avec sa performance pour un spectateur, une proposition programmée sur toute la durée de [frasq]. Mathieu Sanchez et Sébastien Maillet, quant à eux, nous feront vivre une expérience hypnotique mêlant images vidéo, sons et figures masquées. Enfin, dans le cadre de la Biennale Némo, invitation au label Grautag qui réunira quinze musiciens et compositeurs pour une expérience sonore et performative de plusieurs heures.
Au coeur de [frasq] 2015, se déploiera par ailleurs une expérience artistique et collective nouvelle : 24 heures de performances tous azimuts, tous formats. Une façon « d’ouvrir les vannes » et de continuer à questionner la performance. Pour ce faire, Le Générateur a proposé à des artistes qui lui sont proches d’inviter un artiste de leur connaissance. Une occasion d’agir par capillarité et de « glisser subrepticement des êtres et des choses vers les relations qu’ils produisent ». Les Salons de [frasq] viendront enrichir ces 24 heures avec la mise en place de conversations impromptues entre artistes, spectateurs et
participants extérieurs.
Par là, nous voilà ramenés à l’étymologie du mot performance. Le terme anglais performing est issu de l’ancien français parformer : – ce qui prend forme -, ce qui tend vers la forme autant que vers la disparition.
Ainsi, le verbe parformer se conjugue au présent : je parforme, tu parformes, il ou elle parforme, nous parformons, vous parformez, ils ou elles parforment…
Et si nous gommions tous les « si » et agissions là où nous sommes.
Anne Dreyfus et François Durif